20 janvier, 2009
If (Si)
Si : Tu seras un homme, mon fils
Traduction d’André Maurois (1918)
Si tu peux voir détruit l’ouvrage de ta vie
Et sans dire un seul mot te mettre à rebâtir,
Ou perdre en un seul coup le gain de cent parties
Sans un geste et sans un soupir ;Si tu peux être amant sans être fou d’amour,
Si tu peux être fort sans cesser d’être tendre,
Et, te sentant haï, sans haïr à ton tour,
Pourtant lutter et te défendre ;Si tu peux supporter d’entendre tes paroles
Travesties par des gueux pour exciter des sots,
Et d’entendre mentir sur toi leurs bouches folles
Sans mentir toi-même d’un mot ;Si tu peux rester digne en étant populaire,
Si tu peux rester peuple en conseillant les rois,
Et si tu peux aimer tous tes amis en frère,
Sans qu’aucun d’eux soit tout pour toi ;Si tu sais méditer, observer et connaître,
Sans jamais devenir sceptique ou destructeur,
Rêver, mais sans laisser ton rêve être ton maître,
Penser sans n’être qu’un penseur ;Si tu peux être dur sans jamais être en rage,
Si tu peux être brave et jamais imprudent,
Si tu sais être bon, si tu sais être sage,
Sans être moral ni pédant ;Si tu peux rencontrer Triomphe après Défaite
Et recevoir ces deux menteurs d’un même front,
Si tu peux conserver ton courage et ta tête
Quand tous les autres les perdront,Alors les Rois, les Dieux, la Chance et la Victoire
Seront à tous jamais tes esclaves soumis,
Et, ce qui vaut mieux que les Rois et la Gloire
Tu seras un homme, mon fils.
tiré de Si : Tu seras un homme, mon fils de Guillaume Reynard, éditions Flammarion, ISBN 2-08160952-5
Si…
Traduction de Jean-François Bedel (2006)
Si tu gardes ta tête quand la folie des autres,
S’acharne contre toi et te couvre de fautes
Si tu restes confiant, lorsqu’on doute de toi,
Et te veux tolérant, car l’opprobre est sans foi…
Si l’attente chez toi n’engendre aucun soupir
Que jamais médisances ne t’entraînent à mentir,
Ni qu’être détesté ne te force à haïr,
Sans de la perfection vouloir être l’image,
Ni d’aimer pérorer en imitant les sages…Si tu gardes tes rêves sans n’être qu’un rêveur,
Évitant que penser devienne un but en soi…
Si tu peux accueillir l’Échec ou le Succès,
En faisant part égale à ces deux impostures
Si tu peux supporter que ta parole vraie,
Changée par des fripons serve aux sots de pâture,
Si l’œuvre de ta vie s’écroulant devant toi,
Tu ramasses aussitôt les morceaux sans rancœur,
Saisis tes vieux outils, et reprends le labeur…Si tu peux mettre en jeu tout ce qui t’appartient,
Et en risquer l’enjeu d’un coup de pile ou face,
En ayant tout perdu, pourtant garder la face,
Repartir à zéro, sans un mot, ni chagrin ;
Si tu mets ton pouvoir, ton audace et ton cœur,
À servir ta cause, jusqu’à la dernière heure,
Ne pas abandonner quand plus rien ne subsiste,
En toi, que ce Vouloir, cette voix qui insiste,
Et qui te crie : « Tiens-bon ! gardes Force et Vigueur ! »Si parlant à la foule, tu gardes ta droiture,
Accompagne les rois en sachant d’où tu viens,
D’amis ou d’ennemis, redoutes point l’injure…
Si, plus qu’un seul être, pour toi compte l’humain,
Et si face à ce temps à la fuite implacable,
Tu fais à chaque instant ce dont tu es capable,
Permettant que toujours tes travaux s’accomplissent,
Avec tout ce qu’il offre, ce Monde sera Tien…
Et, bien plus encore, tu seras un Homme, mon fils !
aimablement proposé par Jean-François Bedel, traducteur
Pour lire le texte original de Rudyard Kipling et lire d’autres traductions allez donc :
>> ICI <<
Par ankana87 le 20 janvier, 2009 dans poesie
4 commentaires